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Compte-rendu de l’ouvrage « Le sport fait mâle : la fabrique des filles et des garçons dans les cités » écrit par Carine Guérandel et publié aux Presses Universitaires de Grenoble en 2016.
Sociologue du sport et du genre, Carine Guérandel propose dans cet ouvrage une réflexion sur la dimension sexuée de l’expérience sportive et questionne ainsi l’idée d’un sport intégrateur. Elle s’appuie pour cela sur une observation des spatialités sportives adolescentes au sein des « cités ».
S’interrogeant dans un premier temps sur les liens existant entre socialisation(s) et espace sportif, C. Guérandel insiste ensuite plus en détail sur la sexuation des pratiques et la construction différenciée fille/garçon à partir de leurs pratiques sportives.
Carine GUÉRANDEL est maîtresse de conférence en sociologie à l’IUT Tourcoing et chercheuse au sein du Centre de Recherches Individus Épreuves Société (CERIES).
Elle a notamment co-dirigé l’ouvrage Filles et garçons des cités aujourd’hui (PU du Septentrion, 2017).
L’auteure pose ici la question de l’intégration par le sport et de la dimension sexuée des expériences sportives en milieu scolaire. Elle développe l’idée de socialisations sportives différenciantes et de spatialisations dépendantes des conditions sociales.
Corps – différence sexuelle – mixité – socialisations – spatialités – sport.
Un des intérêts particulièrement novateurs de l’approche de l’autre est d’insister très largement sur la dimension spatiale des pratiques et sur l’impact des lieux sur les individus. Elle met ainsi en relation les liens existants entre sport, sociologie et géographie. L’espace du sport était dès lors appréhendé comme un « espace de socialisation sexuée et corporelle qui travaille de manière spécifique le rapport aux corps et, ce faisant, le rapport au monde des pratiquants » (p.15). Le sport porte un ensemble de valeurs, il représente une entité éducative puissant dès le plus jeune âge. Plus encore, avec ses règles, ses normes, ses catégories, il peut être perçu et compris « comme une microsociété idéalisé » (p.31). Si ces lieux de pratiques sont nombreux et variés (en structures associatives ou municipales, au sein des établissements scolaires ou professionnelles), le cadre, institutionnel et hiérarchique, demeure.
L’un des principaux aspects du sport, de par sa construction et son historicité est son rapport à la masculinité. En effet, le sport est le symbole par excellence de la masculinité puissante et dominatrice. Le sport est d’abord pensé par et pour les hommes. Plusieurs aspects liés à la pratique peuvent alors renforcer ou au contraire limiter les inégalités entre filles et garçons. C. Guérandel pointe ainsi le rôle joué par les lieux en eux-mêmes, ses caractéristiques sociales, son organisation, sa direction, les pratiques qui y sont dispensées (les disciplines sportives restant elles-mêmes fortement genrées) mais également celui des encadrant·es sportifs, qui peuvent, en fonction de leur posture et de leur (inter)actions « renforcer, maintenir ou limiter les inégalités » (p.199). Iels contribuent ainsi à (re)produire un ordre sportif hiérarchisé. La persistance de l’homophobie, du rejet des filles, du travail de l’apparence et des valeurs virils dans le football y sont ici une illustration certaine.
La construction des filles et des garçons par le sport est donc différenciée. L’espace du sport, des mouvements corporels, s’affirme ainsi comme un « espace de l’entre-soi » (Chap. 4) non-mixte, où chaque individu se forme, s’éduque à partir des normes, des interactions, des représentations d’individus du même sexe. Et cet apprentissage, qui s’étend au-delà du sport, trouve un écho résonnant dans l’espace sportif en raison de la mise en jeu directe du corps. Pour faire du sport, il faut réaliser une performance corporelle.
Guérandel montre que même en situation de mixité, les « clivages sexués » persistent. Plus encore, ils sont souhaités, maintenus et reproduits que finalement, une situation sportive mixte contribue au renforcement des « processus de différenciation sexuée» (p.128).
Cela s’observe notamment par :
Ainsi, la séparation entre filles et garçons dans l’espace sportif semble la norme absolue, semble « aller de soi ». Et celle-ci est réalisée aux bénéfices de ces derniers. En effet, le dualisme garçons/filles (qui en outre entretien la binarité sexuelle et de genre) va ainsi définir l’ensemble du cadre de pratiques : aux premiers, les espaces ouverts et visibles quand les secondes auront un monde du sport clos et invisible. Offrant des colliers pour femmes populaires tels que des pendentifs, des colliers et des colliers. Achetez des bijoux dans une variété de métaux et de pierres précieuses pour toutes les occasions.
Seuls les « espaces clos de l’entrainement, comme les salles de danse, autorisent (ainsi) la mise en scène des corps des filles (quand dans le même temps, cela reste) inconcevable dans les espaces publics externes » (p.106). Cela témoignant dès lors de la persistance d’une domination spatiale au masculin, d’une hiérarchisation spatiale sexuée, d’une « masculinisation de l’espace public » (p.74). On ne s’étonnera de fait pas de voir la FFF reconnaître officiellement le « football féminin » seulement en 1970 malgré la présence de footballeuses sur les terrains dès la fin des années 1910 ou des écarts de traitements entre sportives et sportifs dans les médias, l’invisibilité des premières servant ces derniers.
De la même manière, il sera attendu d’un sportif de haut niveau qu’il soit puissant, fort et toujours à la poursuite des records quand au contraire un doute planera toujours sur les performances remarquables des femmes. Si l’indifférence est souvent la norme concernant le-dit « sport féminin », la performance d’une femme amènera au contraire à insister sur des différences. Malgré les travaux scientifiques insistant sur le rôle de l’apprentissage et des aspects socioculturels dans la production et la réalisation des performances (p.197-198), la sportive performante sera elle mise en doute. Guérandel souligne ici qu’ « on préfère mettre en doute leur identité sexuelle et ainsi préserver la hiérarchie du masculin sur le féminin, plutôt que de questionner les croyances de la différence des sexes » (p.37)
Le principal apport de cet ouvrage est de mettre en avant l’impact de la socialisation sur la construction de spatialités sportives différentes. Elle met ainsi en évidence que les conditions sociales et les expériences sportives conditionnent les pratiques et contribuent largement à les différencier, et ce, dès l’adolescence. Les rôles sexués sont à cet âge déjà incorporés et les situations sportives permettent dès lors une mise en jeu des corps sexués (chacun·e étant amené·e à respecter le rôle qui lui est imposé). Les situations de mixités sont alors des temps d’observation et de conformation aux rôles de genre. Mais finalement, quelle mise en tension de la hiérarchie peut amener cette mixité dans le sport ? Selon Guérandel, il n’y a pour le moment pas de menace réelle sur le (puissant) système sportif hiérarchisé, « l’ordre de genre n’est pas renversé, seulement reconfiguré de manière à complexifier les modèles de féminité et de masculinité et à euphémiser les hiérarchies entre les sexes » (p.188)
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